Festa de Iemanjá
20:08
Fête de Iemanjá. Candomblé. Umbanda. Catholicisme. Afro-Brésil. Mère Aíce de Oxóssi. Terreiro Odé Mirim. Salvador. État de Bahia. Le 2 février. Plus d’un million de participants
Fête de Iemanjá
Voici la mer, la mer pleine de fleurs parfumées et de miroirs. À Rio Vermelho, “Rivière rouge”, Sainte Anne des pêcheurs et la Reine des Mers des Noirs confluent et fusionnent dans la baie aux deux noms, celle de São Salvador, mais qui est aussi de Todos os Santos, la Baie de Tous les Saints. La plage où la fête a lieu, quant à elle, se nomme Paciência, “Patience”.
La Grande Mère, mère de tous les Orixás et elle même Orixá de toutes les eaux et de la fertilité, guide ses enfants comme elle guide les poissons qui apprennent à nager. Elle est bien sûr aussi la Mère des pêcheurs et des bateliers qui partent travailler au petit matin. Ce sont eux qui inicièrent, il y a presqu’un siècle les célébrations en son honneur, si l’on en croit les conteurs d’histoires Bahianaise. Pionniers d’autrefois, ils sont aussi les premiers, le jour de la fête, à offrir leur foi et leurs prières à la sainte qui apparut un jour sur les eaux pour les protéger.
“Iemanjá,
Reine des ondes,
Sirène de la mer”
Chant à Iemanjá
À l’intérieur des terreiros, les Candomblés aussi font leurs rituels en l'honneur de la grande Orixá. Mais, à Salvador, toute offrande à la Reine des Mers doit être précédée d’une offrande à la Reine des eaux douces : c’est donc à Oxum, toute vêtue de jaune, que chaque année dans la nuit du 1er au 2 février, on dédie les premières célébrations, au Dique do Tororó.
Puis, les gens des terreiros, habillés du blanc des anciens, sortent dans la rue. Comblant la ville de leurs chants, ils apportent des paniers pleins d’offrandes à Iemanjá : des milliers de fleurs pour Odoyá !
“Nombreux sont les voeux qu’on lui fait et qu’elle exauce.
Elle est heureuse de voir tous ces paniers”
Mãe Aíce de Oxóssi do Terreiro Odé Mirim
Les bateleurs, les faiseurs de “macumba”, les touristes, les catholiques, les fêtards, tout le monde accourt et vient fouler le sable de la plage. On lance des feux d’artifice pour celle qui nous enseigne à contrôler nos émotions. Les applaudissements, les atabaques, les chants, les louanges s’accumulent comme autant de perles qui s’enfilent en une même histoire faite de rencontres. Cette année-là, c’est Mère Aíce qui s’occupe du cadeau principal que l’on fait à Iemanjá : des offrandes serties de mystère, préparées tout au long d’un rituel de sept jours selon les principes de l’Axé.
Les corps tremblent, les vues s’obscurcissent. Des incorporations et des transes surgissent et forment spontanément des rondes. Personne parmi le Povo de santo ne veut perdre l’opportunité de rendre grâce cette année ! Au milieu des gestes de capoeira, des mains enlacées, des bougies allumées et des soupirs, il est presque possible de les entendre demander à l’unisson : comment faire pour ne pas renoncer à aimer, ô Mère ?
Ces mots, ces pensées qu’on lance dans les airs et dans la mer font très vite réveiller la ville. Le profane vient embrasser le sacré dans ces rues en pente que l’on est tellement habitué à voir fêter. C’est la foule, comme au carnaval, qui inonde alors le quartier et vient se joindre à ceux qui prient sur le sable.
“Je suis brésilienne : je suis fêtarde et faiseuse de Macumba de naissance”
Mãe Aíce de Oxóssi do Terreiro Odé Mirim
Alors, le soleil se lève et c’est le signe qu’il est peut-être temps de rentrer. Les eaux scintillent et à nouveau, les pêcheurs prennent la mer sur leur bateaux chargés d’offrandes. Elle est présente, dans le flux de l’eau qui va et qui vient, des eaux parfumées par tous ceux qui vinrent La saluer cette nuit. C’est Elle qui fait battre les coeurs, comme pour faire écho aux Atabaques. Et les regards, surtout lorsqu’ils se croisent, ne laissent plus l’ombre d’un doute : Ici, la foi est tellement grande qu’elle déborde.
entretien
Mateus Aleluia
09:43